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Qui êtes-vous : une carpe, un requin ou un dauphin…?

3 avril 2017

La stratégie du dauphin (The strategy of the Dolphin : Scoring a Win in a Chaotic World) écrit par Dudley Lynch et Paul L. Kordis est paru en 1990… 27 ans déjà! Et pourtant, l’idée semble plus actuelle que jamais.

En 1990, le monde chaotique dont parlent les auteurs n’avait encore rien à voir avec celui d’aujourd’hui. L’arrivée d’Internet a accéléré notre rythme de vie, plus effréné que jamais dans l’histoire de l’humanité. Il semble que même le temps n’ait plus de temps! Récemment, Le Devoir a publié un article intitulé «Le Québec en surmenage social». Ce n’est donc pas sans raison que les billets qui portent sur le bonheur au travail sont parmi les plus lus. Et notre article «Protégez les employés des leaders destructeurs» a connu, en septembre dernier, une popularité impressionnante…

Inspiré des personnages du livre, nous aborderons donc, en deux temps :

  1. LA STRATÉGIE DU DAUPHIN : LES POISSONS
  2. COMMENT TRANSPOSER LA STRATÉGIE À L’ENTREPRISE

 

Première partie ― la stratégie du dauphin : les poissons

Selon Lynch et Kordis, il existerait dans l’océan du monde (nos organisations par exemple), trois espèces de poissons : les carpes, les requins et les dauphins. Il y a quelques années, des chercheurs de San Diego ont mis 95 requins et 5 dauphins ― pas de carpes ici, mais vous comprendrez le lien! ― dans une grande piscine et les ont laissé vivre ensemble pendant une semaine. Sept jours plus tard, devinez ce qu’ils ont observé…? Avant de vous dévoiler le punch, voici une brève description des poissons en question, en faisant une analogie avec nous les humains.

La carpe

La carpe est une victime, elle veut éviter d’avoir mal et pour ce faire, elle est prête à tout sacrifier. À la moindre difficulté, elle s’enfuit. Bien souvent, elle a vécu certains événements traumatisants, et elle se sent prisonnière de la défaite. Elle est donc une partisane du statu quo et évite le changement pour ainsi diminuer les risques de souffrance. Auto sabotage, pensées limitantes, victime chronique; la carpe a la force d’agir, mais sa peur de l’adversité l’empêche de faire face, de prendre ses responsabilités. Cependant, les carpes sont fières, elles donnent bonne image, en évitant de se prononcer ou en se retirant du jeu. Ainsi, les autres passent pour les méchants…

La carpe a développé une mentalité qui prône le désengagement et de renoncement. Pour elle, le monde est pénurie.

Soit dit en passant, nous avons tous déjà été une carpe…

Un autre modèle de carpe a vu le jour avec le mouvement de la pensée positive : la carpe pseudo-éclairée. Celle-ci voit d’immenses capacités dans l’être humain. Contrairement à sa cousine, elle vit dans un monde d’abondance : «Je n’ai qu’à toujours lâcher prise et tout ira bien. Toutes les créatures devraient s’aimer et prendre soin les unes des autres». Seul petit hic : elle ne passe pas à l’action, elle ne provoque pas le changement pour ne pas perturber son environnement et donc, n’avance guère plus que son acolyte la carpe. Elle se prend pour un dauphin, mais parce qu’elle est souvent trop gentille pour son propre intérêt, elle se fait dévorer par le requin.

Le requin

Le requin est un prédateur, aucune surprise ici! Il n’a pas de remords à remporter la victoire au détriment des autres. Il ne fait aucune distinction. Pour lui, tout est menace et pénurie; tout le monde est un ennemi potentiel. Il vit dans un univers pauvre et étroit, toujours prêt à attaquer. «Pour que moi je gagne, toi tu dois perdre». Il est plutôt loin de prôner l’approche gagnant-gagnant. Le requin a d’ailleurs plusieurs stratégies dans son sac pour gagner; car c’est tout ce qu’il veut, peu importe comment il doit s’y prendre pour y arriver : la tricherie ainsi que semer la panique et la confusion en agitant l’eau, à l’aide du déni : en n’avouant jamais ses fautes et en déformant la réalité, il espère ne jamais être mis en cause.

Le requin a une soif de pouvoir, un besoin de contrôler les autres. Il maintient donc un climat de crise pour entretenir la dépendance d’autrui vis-à-vis de lui. Pour lui, seule sa vision est valable. Narcissique et doté d’un fort égo, il préfère voir la vie à travers son propre jugement; pour le requin, les idées et les solutions proposées par autrui ne méritent pas son attention. Il prône la mainmise, mais s’il se retrouve devant plus fort que lui, il peut avoir recours au compromis. Or, cette stratégie de mainmise n’est pas viable à long terme.

Le dauphin

Contrairement aux deux autres espèces qui vivent dans un monde de carence, le dauphin prêche l’abondance ― il croit à la possibilité d’une pénurie, mais a choisi de ne pas y adhérer. C’est un mammifère marin enjoué adepte de la coopération qui peut adapter son comportement selon la situation pour ainsi mieux exploiter les ressources et trouver la solution élégante : celle qui allie précision, cohérence et simplicité. En utilisant sa flexibilité, il enclenche un effet de levier qui vise à faire plus avec moins. D’ailleurs, la loi de la cybernétique stipule que la personne la plus flexible aura l’avantage dans n’importe quelle situation. Pas du genre à appliquer aveuglément des principes, le dauphin préconise ce qui fonctionne.

Puisqu’il sait s’adapter, le dauphin se comportera parfois en carpe, parfois en requin, selon la situation. Mais le dauphin agit dans un but précis, en pleine connaissance de cause, en espérant mener les choses vers l’amélioration, l’innovation et l’évolution en repoussant toujours les limites, en tendant vers un monde où il n’y a que des gagnants.

La mainmise, le compromis, le renoncement, le désengagement et le non-engagement sont toutes des stratégies utilisées par le dauphin. Mais à la différence de ses colocataires les requins et les carpes, il n’agit pas dans son intérêt personnel, mais pour le bien collectif. Ainsi, il pourra utiliser la mainmise et aller jusqu’à froisser certaines personnes dans le cas d’une urgence médicale (et il s’occupera de prendre soin des relations une fois l’urgence passée). Quand le résultat importe peu, le dauphin pourra avoir recours au désengagement. Le non-engagement est probablement la stratégie la plus prisée par le dauphin. Il évite ainsi des expériences peu constructives pour investir son temps dans ses buts et valeurs.

Alors, que s’est-il produit dans la piscine, selon vous? Eh bien, les chercheurs ont retrouvé 95 requins morts et 5 dauphins qui s’amusaient ensemble[1]. Que s’est-il passé?

 À suivre…

Isabelle Vincelette, Experte amélioration organisationnelle et coaching

[1] Peacock, Fletcher, Arrosez les fleurs et non les mauvaises herbes, Les éditions de l’Homme, 2007

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